Afin de faciliter l’accession à la propriété de la résidence principale, la loi exonère la plus-value réalisée au titre de la 1ère cession d’un logement autre que la résidence principale lorsque le prix de cession est remployé pour l’acquisition d’une résidence principale.
Cet avantage est réservé aux personnes qui n’ont pas été propriétaires de leur résidence principale dans les 4 années qui précèdent la cession…
Dans ses commentaires, l’administration fiscale interprète cette exclusion légale de façon extensive. Elle précise en effet qu’elle vise non seulement les pleins propriétaires, mais également les détenteurs d’un droit démembré (usufruit ou nue-propriété) sur leur résidence principale.
Un requérant contestait cette interprétation, considérant que ces commentaires étaient susceptibles d’être mis en cause devant le Conseil constitutionnel car rajoutant à la loi. Le Conseil d’Etat a cependant refusé contre l’avis de son rapporteur de faire suivre cette demande aux Sages. Selon les juges, en précisant que la détention par le cédant d’un droit réel immobilier sur le bien qu’il a élu pour résidence principale fait obstacle à ce qu’il puisse bénéficier de l’exonération des plus-values qu’il a réalisées lors de la 1ère cession d’un logement autre que sa résidence principale, les commentaires se bornent à expliciter les dispositions de la loi, sans y ajouter, et sans méconnaître l’objectif poursuivi par le législateur.
Le Conseil d’Etat ajoute que la différence de traitement entre les contribuables qui ont été titulaires, temporairement ou non, d’un usufruit sur leur résidence principale au cours de la période de référence et ceux qui l’ont occupée au cours de cette même période en vertu d’un contrat de location est justifiée par une différence de situation en rapport direct avec l’objet de la loi (faciliter la primo accession de la résidence principale). Cette exclusion n’est donc pas contraire au principe d’égalité devant les charges publiques garanti par la Constitution.
Cette décision, conforme au droit des biens, peut s’avérer pénalisante pour les personnes qui ne détiennent qu’un droit démembré parfois temporaire sur leur résidence principale : par exemple un étudiant détenant un usufruit temporaire sur sa résidence principale (usufruit temporaire concédé par ses parents en vue de réduire leur base taxable à l’IFI).
Elle est, par ailleurs, surprenante dans la mesure où le rapporteur préconisait, dans ses conclusions, d’annuler la doctrine excluant les détenteurs de droits démembrés. Selon le rapporteur, l’objectif du législateur était d’exclure uniquement de la mesure d’exonération les pleins propriétaires (y compris en indivision), non les détenteurs d’usufruit…
Source : CE, n° 453490, 15 juill. 2021