Article rédigé par Vincent MARTINS, Responsable Partenaires chez Tilvest, spécialiste en crypto pour les professionnels de la gestion de patrimoine.
En 2023, 4,8 millions de français ont déjà investi en cryptoactifs et 26% d’entre eux l’envisagent dans un futur proche[1]. Face à cette nouvelle tendance, quelle position les conseillers en gestion peuvent adopter et comment accompagner les investisseurs sur cette nouvelle classe d’actifs ?
Qu’est-ce qu’un cryptoactif ?
Comprendre les cryptoactifs
Les cryptoactifs, ou cryptomonnaies, sont des actifs numériques basés sur une technologie de registre décentralisé et sécurisé, la blockchain. Contrairement aux monnaies traditionnelles, ces cryptoactifs opèrent indépendamment des banques centrales ou des institutions financières. Ils fonctionnent et s’échangent sur un réseau peer-to-peer (pair-à-pair) de participants qui vérifient et valident les transactions.
L’exemple de Bitcoin
Le Bitcoin, conçu en 2009, est le tout premier cryptoactif qui reste le plus connu, et capitalisé, à ce jour. Au cœur de sa conception réside une vision d’une monnaie numérique sans contrôle centralisé, offrant ainsi une alternative aux systèmes financiers traditionnels. Le Bitcoin repose ainsi sur la technologie blockchain, qui permet d’enregistrer chaque transaction de manière transparente et immuable.
Le Bitcoin présente des caractéristiques clés qui ont stimulé son adoption et sa notoriété.
- Décentralisation : contrairement aux devises traditionnelles, le Bitcoin n’est pas émis par une banque centrale ou un gouvernement. Il est créé par un processus appelé « minage », où les participants utilisent des ordinateurs afin de résoudre des problèmes mathématiques complexes, permettant de valider les transactions et sécuriser le réseau.
- Offre limitée : une caractéristique distinctive du Bitcoin est sa limite, fixée à 21 millions d’unités pouvant être créées. Cette limite contraste avec les monnaies fiduciaires qui peuvent être imprimées à volonté et pose la question de l’inflation et la valeur à long terme du Bitcoin.
- Sécurité :la sécurité du Bitcoin repose sur la technologie de la blockchain, qui garantit l’intégrité et la confidentialité des transactions. Chaque transaction est cryptée et ajoutée à un bloc, qui est ensuite ajouté aux autres blocs pour former la chaîne de blocs (blockchain), rendant ainsi les transactions transparentes et infalsifiables.
- Pseudonymat : les transactions Bitcoin sont semi-anonymes. Bien que les transactions soient enregistrées sur la blockchain, les utilisateurs sont identifiés par des adresses numériques qui ne sont pas directement liées à leur identité réelle.
Le Bitcoin a également ouvert la voie au développement d’autres cryptoactifs, chacun explorant des applications spécifiques de la technologie blockchain. L’impact va au-delà de la finance, touchant les domaines de la technologie, de la gouvernance et de la confiance numérique.
Un actif de diversification
Dans sa dernière étude annuelle, Amundi – leader de la gestion d’actif en France – affiche son optimisme sur les cryptos, qu’il considère comme une classe d’actif à part entière[2]. Néanmoins, ce nouvel écosystème possède son propre fonctionnement, avec ses particularités opérationnelles et réglementaires. Il offre ainsi des opportunités d’investissement mais implique également des risques spécifiques.
Contrairement aux principaux actifs qui sont détenus dans des enveloppes spécifiques (compte-titres, PEA, contrats d’assurance-vie), les cryptoactifs sont détenus via un portefeuille numérique propre à chaque investisseur et peuvent être échangés sans l’intervention d’un tiers (banque, assureur). Ainsi, chacun peut devenir sa « propre banque », ou plus précisément, être le seul détenteur de ses propres actifs – numériques en l’occurrence.
La diversification des actifs est une stratégie que les investisseurs peuvent adopter pour atteindre leurs objectifs financiers. Lorsqu’il s’agit de diversifier leur portefeuille en incluant des cryptoactifs, il semble essentiel de bénéficier de l’accompagnement d’un conseiller financier qui réalisera les étapes nécessaires, telles que l’évaluation du profil de risque, l’analyse de la connaissance financière et la mise en place des procédures KYC, afin de réaliser cet investissement.
En effet, cet investissement comporte des risques : perte de l’accès au portefeuille numérique, faillite de certaines plateformes, tentative d’hameçonnage ou de phishing, hack… C’est pourquoi il convient d’être guidé et de choisir un acteur adapté aux besoins des conseillers mais aussi des investisseurs avant de se lancer.
Comment investir dans les cryptoactifs ?
Il convient dans un premier temps d’ouvrir un portefeuille numérique. C’est un dispositif qui permet de stocker et de gérer des cryptoactifs. Il peut être utilisé en toute autonomie pour envoyer et recevoir des cryptos, ainsi que pour consulter le solde et l’historique des transactions.
Ce portefeuille, ou “wallet” fonctionne via :
- une clé publique : adresse de destination qui va permettre d’être identifié par des tiers et de recevoir les cryptoactifs. C’est l’équivalent d’un RIB/IBAN.
- une clé privée : clé de chiffrement cryptographique qui permet au propriétaire du wallet d’accéder à son portefeuille et de valider les transactions. C’est l’équivalent du code d’accès à votre compte bancaire.
Une alternative consiste à passer par un échange centralisé (Binance, Coinbase) qui acquiert et détient les cryptos pour le compte des investisseurs.
Néanmoins, cette solution, moins transparente, est similaire au fonctionnement d’une banque qui détient ses actifs pour le compte de tiers. Il est préférable que le portefeuille des investisseurs soit ségrégué de tous les autres.
Une fois le portefeuille ouvert, les investisseurs peuvent désormais y détenir des cryptoactifs, comme du Bitcoin ou encore de l’euro ou du dollar numérique. Ils auront également le choix entre gérer eux-mêmes ces cryptoactifs ou déléguer leur gestion à un tiers.
Il est tout à fait possible pour un CIF (conseiller en investissements financiers) d’accompagner et de conseiller ses investisseurs sur les actifs numériques, comme l’a récemment confirmé l’AMF[3]. Néanmoins, la majorité des conseillers se repose actuellement sur un PSAN (prestataire de service en actifs numériques), enregistré auprès de l’AMF, afin de déléguer l’ouverture du portefeuille électronique, la conservation et la gestion des cryptoactifs de leurs investisseurs.
[1] Etude KPMG-ADAN, 2023
[2] https://research-center.amundi.com/article/crypto-crunch-what-s-next – Mars 2023
[3] Doctrine AMF du 21 décembre 2022, point 1,8 de la recommandation DOC-2006-23